Les Victorieuses

Genre : Littérature française

Editeur : Roman-grasset

Résumé :

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Brillante avocate, Solène tente de se reconstruire après un burn out. Acceptant une mission bénévole d’écrivain public, elle est envoyée au Palais de la Femme, un foyer au cœur de Paris. Les résidentes s’appellent Binta, Sumeya, Cvetana, Salma ou la Renée et viennent du monde entier. Lorsqu’elles voient arriver Solène, elles se montrent méfiantes. Mais Solène est bien décidée à trouver sa place auprès de ces femmes aux destins tourmentés…
Un siècle plus tôt, Blanche Peyron œuvre en faveur des démunis. Elle a voué sa vie à l’Armée du Salut et rêve d’offrir un refuge à toutes les exclues de la société. Le chemin est ardu, mais elle ne renonce jamais.

Laetitia Colombani donne vie à ces victorieuses anonymes, à Blanche l’oubliée, à toutes celles qui refusent de se résigner.

Mon ressenti :

Les Victorieuses est le 2e roman de Laetitia Colombani paru à ce jour. Après La tresse qui m’avait beaucoup plu (ici), l’autrice revient avec des thèmes encore plus forts !

C’est à travers les yeux de Solène, avocate en droit des affaires sur la pente ascendante du succès que l’on va avoir sur divers angles la misère des femmes, la misère humaine.

À la perte de son procès qui ruine son client sous le jugement sévère du juge qu’elle ne comprend pas, Solène assiste, impuissante, à son désespoir. La critique implicite sur le puits de lumière conçu au nouveau palais de justice de Paris m’a plu, car en effet, les sentiments confus qui frappent les condamnés ne semblent pas avoir été pris en compte par les architectes…

Le métier d’avocat est difficile pour bien des raisons : volume horaire lourd, sacrifices obligatoires si on veut vivre confortablement, liens distendus entre la famille et les amis à force d’annuler une sortie, confusion des sentiments entre le client et le professionnel. Le dernier point notamment est important à soulever. Tout comme les médecins, les avocats font partie des premiers à être confrontés au genre humain dans tous ses états, et parfois, pas les plus beaux.

Certains sont d’avis que les avocats sont froids et ne pensent qu’à l’argent, comme si revêtir cette robe coupait les vannes des émotions. Pourtant, de nombreux avocats prennent à cœur certains dossiers, parfois même trop. Cela varie selon leur volonté de faire leur client se sortir d’un mauvais pas, notamment pour les dossiers concernant les mineurs où il est complexe pour certains de ne pas être touchés par les situations.

Solène, elle, l’a été à ce moment précis. Elle a basculé, elle aussi. Et son burn-out va révéler combien elle a encaissé avec cette profession en se battant pour l’exercer. Le sentiment d’avoir été inutile la chagrine, et il est ajouté à tous ses désirs cachés qu’elle a du ravaler afin d’être aimé et accepté. Le psychiatre lui conseille alors le bénévolat.

Une avocate en larmes au milieu d’un foyer pour femmes en difficultés. Et dire qu’elle est supposée les aider…

La trame peut paraître facile, et dans les faits, ce n’est pas quelque chose de très complexe, mais le livre n’en reste pas moins très bon. Il l’est parce qu’il montre plusieurs vérités. Il l’est parce qu’en Solène, au-delà de son statut d’avocat, il y a un bout de chaque citoyen en elle car ses réactions et comportements sont communs. Des états de faits que beaucoup savent mais font mine de ne pas voir, car il est toujours plus simple de fermer les yeux face à la dureté du monde.

Cela peut ne pas plaire de se voir dans un reflet quand ce sont surtout les mauvais points qui sont soulignés.

Le malheur, le vrai, elle en a été préservée. Elle le voit dans les journaux, dans les reportages télévisés. Elle l’observe de loin, depuis le bon côté de la barrière. Comme tout le monde, elle connait le mot « précarité », omniprésent dans les médias, mais ne s’est jamais frottée à sa réalité.

Ce livre est une critique de la société, que ce soit concernant les habitants ou ses dysfonctionnements intrinsèques. Il place l’humain au centre, la femme surtout, mais pas que dans les diverses violences qu’elles peuvent endurer. Par la narration où l’on suit l’histoire de Blanche Peyron, on verra l’image d’une femme forte et courageuse, malgré ses poumons lâches, qui jusqu’au bout, ce sera battu pour que les femmes aient un lieu où se réfugier.

Le Palais de la femme existe jusqu’à ce jour, et ce trait historique dans le récit a aussi montré comment à contre courant, une femme désintéressé a marqué l’histoire, même si peu de personnes le savent.

Solène va donc côtoyer des femmes de différentes cultures, ethnies, religions au Palais de la femmes. Toutes celles qui pour une raison ou une autre, se sont fait broyer par la société, rejeter par elle, et qui, dans cet endroit sécurisé à Paris, recollent leurs morceaux pour continuer de vivre.

La terre ne tourne pas comme elle devrait. Les femmes du foyer manquent de tout, d’argent, d’affection, de liens, d’éducation. Elle-même habite un bel appartement, elle a trois comptes épargne au plafond et elle est malheureuse comme jamais.

Et des thèmes importants comme le chômage, les sans domiciles fixe, l’excision, les violences conjugales et d’autres points qu’il vous appartient de découvrir sont abordés à travers chacune des membres du Palais de la Femme. À travers Blanche Peyron, qui elle aussi, surtout à l’époque où elle a grandi, fait passer des précieux messages.

Elle comprend maintenant le chagrin dans ses yeux, cette tristesse millénaire qu’elle porte en elle, comme on porte une croix le long d’un calvaire. Celle de ces millions de femmes mutilées, abîmées dans leur chair au cours des siècles et des siècles, au nom de traditions.

Affinités :

Personnellement, j’ai beaucoup aimé ce roman car les souffrances des femmes et la misère sont des thèmes qui m’ont toujours touché. Je les ai en tête en permanence mais les lire a toujours un effet puissant sur moi. Donc je le recommande à ceux du côté de cette barque, mais pas que….

Je pense que ceux aimant vivre dans leur bulle peuvent avoir deux réactions après la lecture de ce roman : soit ne pas l’aimer en estimant que c’est « trop » et préférer la lutte de Blanche qui est le symbole d’une femme vaillante par excellence, soit l’apprécier car ça leur ouvrira les yeux.

Ma note : 20/20

Coup de cœur !

11 réflexions sur « Les Victorieuses »

  1. Une chronique riche et intéressante ! Je dois lire d’abord la tresse avant celui-ci ! Je regrette juste que tu ne parles pas du style de l’autrice dans ta chronique ! 😀 Car c’est pour moi ce qui peut faire la différence entre le lire ou pas : si le style est plutôt poétique, je vais adorer, sinon c’est plus risqué ! Après tes extraits sont beaux et bien choisis, et me laisse supposer que c’est une écriture travaillée qui m’attend dans ce roman !
    Merci pour ton avis précis !

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    1. Je te remercie ! Oui, je n’ai pas spécialement parler de son style comme j’y ai mis des citations, mais si tu veux, tout au long du livre, elle fait des rimes avec pas mal de phrase, donc ça donne un certain rythme à la lecture, mais elle n’enjolive pas forcément, ses phrases restes plutôt naturelles mais leur effet sur le lecteur n’en reste pas moins fort selon sa subjectivité !

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  2. Ton retour fait très envie mais, même si c’était une belle histoire, La tresse n’a pas été aussi fort que ce que je pensais trouver au départ. Alors, j’ai quand même un peu peur. J’essaierai peut-être, un jour. 😉

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    1. Par rapport aux thèmes abordés, comme il y avait celui de la misère dans la tresse et que tu n’avais apprécié que la partie sur le cancer de l’avocate, celui-là étant un concentré de la souffrance des femmes et de la misère humaine, je ne pense pas que tu aimerais les Victorieuses.

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      1. Je l’ai vu en magasin, j’ai failli le prendre mais je me dis que ça ne sera peut-être pas aussi bien que ça pour moi. Donc peut-être un jour mais là, il faut que je me recentre sur les livres que j’ai déjà. Mon bilan de juin sera un peu la folie en terme d’acquisition de livres. En rapport, je n’ai pas beaucoup lu. 🙁
        Eh bien, merci, de ne pas m’y pousser. 😉

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