Lire Perfect world : un manga social qui émeut, Tomes 2 à 8

Perfect world de Rie Aruga est un manga josei édité par Akata.

Résumé du tome 2 : perfect-world-tome-2-855764

Tsugumi et Ayukawa ont décidé de se mettre en couple ! Mais les deux jeunes adultes, devant mener de front vie professionnelle et vie privée, ne se doutent pas encore des obstacles qui vont se dresser devant eux.

À commencer par leurs proches, qui n’acceptent pas tous la situation… Leur amour naissant pourra-t-il survivre à toutes ses épreuves ?

Mon ressenti :

Lire ce josei a été une riche expérience pour la lectrice de manga que je suis. Comme je l’avais dit dans la chronique du tome 1 (que vous pouvez retrouvez ici) le moteur de cette histoire n’est pas la romance, c’est le handicap. La romance  permet, à mon sens, de montrer d’autres épreuves qu’affrontent ces personnes dans un contexte plus intime et familial. 

Nous sommes certes placés dans un contexte conservateur dans le Japon où souvent, les jeunes femmes doivent se marier à un certain âge sinon c’est mal vu et fondent une famille, pour finir (souvent) femmes au foyer, mais il est aisé de transposer les faits à la société française.

Tsugumi et Ayukawa vont donner une chance à leur histoire mais ce n’est pas au goût de la famille de Tsugumi qui ne cache pas leur réaction quand ils voient qu’il est handicapé. Tout de suite, les parents expriment leur désapprobation : il ne peut pas s’occuper de toi, comment fonderas-tu une famille ? Le peut-il au moins ? Ce n’est pas de ce genre d’homme dont tu as besoin.

Vous l’aurez compris, il y a beaucoup de paroles blessantes, peu de tolérance et d’acceptation envers le choix de leur fille qui est pourtant majeure et indépendante. Le plus triste est que ce couple n’est pas un cas isolé, l’auteure montrera dans les autres tomes que très souvent, la famille n’approuve pas l’union. Et pire, que certains cèdent sous une mine réjouie lors d’un mariage unissant une femme handicapée à cause d’une maladie et d’un homme en se disant :

Elle n’en a plus pour longtemps, va. Alors je peux bien leur ficher la paix en attendant  

Si le tome 2 et 3 ne m’avaient pas vraiment charmé à cause du comportement immature de l’héroïne, la suite, et notamment les autres personnages bien travaillés qui apportent tous un plus à l’histoire ont crée des vives émotions lors de ma lecture.

Tsugumi croit en son histoire d’amour avec Ayukawa. Elle fait de son mieux, essaie de l’épauler, mais au final, ne parvient pas à gérer les situations stressantes telles que la survenance de complications médicales et qu’il faut par exemple ôter un fécalome ou savoir comment réagir face à un escarre et ses conséquences. 

 En soi, je ne lui jette pas la pierre pour ceci.  C’est un personnage objectivement réussi parce qu’en fait, le lecteur peut facilement se mettre à sa place. Combien saurait parfaitement gérer ce genre de situation s’il ne travaille pas dans le monde médical ? Personnellement, ce manga m’apprend énormément de choses et je me serai sans aucun doute retrouver aussi incapable qu’elle face à ces problèmes si je ne m’étais pas renseigner pour être un solide pilier. Ce qui m’a dérangé ont été ses réactions (puériles/ inappropriées) quand Nagasawa est entrée en scène et a fini par la recadrer.  Ce personnage féminin à d’ailleurs mon affection, tout comme Koré-éda, car tous deux aiment patiemment et sont généreux alors qu’il n’y a pas de réciprocité à leurs sentiments.

Dans le contexte de la romance, ces deux personnages représentent bien l’amour patient et vrai : celui qui prend soin, à tous moments sans jamais se plaindre et en donnant tout de lui-même pour que l’être aimé aille mieux. Dans le cas de Koré-éda, Tsugumi connait ses sentiments…la sensation qu’elle l’utilise va et vient, faisant que je n’apprécie pas ce personnage féminin du manga. C’est bien la seule que je n’aime pas.

Nagasawa, la physiothérapeute qui a sorti Ayukawa de sa dépression et l’a secoué pour qu’il suive sa rééducation se place comme une rivale de taille pour Tsugumi : elle, elle était présente dans les moments sombres d’Ayukawa, elle ne rechigne pas à agir pour son bien, quitte à effectué des actes « salissants ». Elle le fait passer en priorité, ne se focalise pas sur la présence d’une « rivale ». C’est pour cela que Tsugumi m’avait agacé : au lieu de chercher à s’améliorer pour mieux réagir, elle s’inquiète de la présence d’une femme qui peut aider alors que la vie de son copain est menacée. Ce n’était ni le lieu, ni le moment de laisser parler sa jalousie. Mais même cela, on peut le considérer comme une réaction « normale », humaine et réaliste. La subjectivité jouera selon qu’on tolère ou non la jalousie.

De la jalousie, comme de la mesquinerie, à l’hypocrisie, jusqu’aux vrais actes de bon cœur, de preuve d’amour et d’actes désespérés, du tome 1 jusqu’au tome 8, il n’y a eu que justesse entre ces pages.  Perfect world est d’une richesse émotionnelle et pédagogique le faisant se démarquer des autres histoires, mais c’est aussi une oeuvre forte et humaine qui ne cesse d’accumuler les bons points. 

Je vous l’ai dit : les personnages apportent tous leur pierre à l’édifice. L’auteure n’exagère pas les réactions, elle retranscrit la joie, la peine et la détresse de chacun de façon si vraie qu’on ne peut que ressentir soi-même ce qu’ils vivent. Pour ceux empathiques, l’effet peut être frappant.

Il y a des drames, je dirai que la vie de ces personnes, ce qui leur est arrivé, est un drame, et c’est de voir comment chacun d’entre eux se décide à vivre avec cette partie d’eux en moins, ces difficultés constantes et perpétuelles et l’épée de Damoclès au dessus de leur tête qui émeut. 

Dans la postface de l’auteure, elle a expliqué que certains lecteurs hésitaient à continuer à cause de la mélancolie devenant très présente à certains moments. Bien que je puisse comprendre qu’en général on préfère lire des choses gaies, dans le cas précis où il s’agit de personne voyant leur vie changer du tout au tout, définitivement, il me parait impossible que tout soit rose. Au contraire. La tristesse dans cette histoire est normale et bien dosé. Combien serait véritablement serein et heureux juste après un accident leur privant de leur motricité ?  Combien ne serait pas frustré de ne pas pouvoir accéder à un lieu ou à un objet parce qu’il y a une marche d’escalier ou que c’est en hauteur ? Parfois, de simples centimètres ou une mauvaise inclinaison peut rendre cela pénible. Il faut ouvrir les yeux : des choses futiles et faciles que nous faisons sans y penser deviennent une épreuve difficile pour les handicapés, surtout si le lieu n’est pas aux normes d’accessibilité.

Voilà un angle appréciable de plus du manga : Ayukawa est un architecte, et étant handicapé, il sait plus que bien ce qui conviendrait à ceux dans son cas. Les recherches de l’auteure nous cultive : du schéma à la construction, on voit des maisons universelles prendre forme, donnant espoir à des couples où, par exemple, celle atteinte d’un handicap se repliait sur elle-même, refusant d’être un poids pour son compagnon, prête à rester dans sa solitude et souffrance pour ne pas l’y entraîner.

Avec cet élément narratif, l’auteure dessine une deuxième forme et preuve d’amour : le fait d’être prêt à rester seul et se priver de bonheur pour ne pas être un poids et « voler » la vie d’autrui. Il faut une force incroyable pour choisir de museler son envie d’être heureux, faire cela, c’est être capable d’un effacement de soi prodigieux, d’une capacité à ravaler son égoïsme pour le bien de celui qu’on aime. Peu de personnes le peuvent. La culpabilité, l’angoisse, la crainte, et la peur de détruire l’avenir de leur compagnon sont des émotions qui ne lâchent pas les personnes handicapées (dans le manga en tout cas), faisant qu’elles sont plus à mêmes à effectué ce geste.

Tout ce que je souhaite en réalité…c’est que Kei reste auprès de moi. Mais je refuse de gâcher son avenir. Je refuse qu’il souffre à cause de moi !

Le deuxième axe est qu’une maison universelle adoucit tant la vie des personnes à mobilité réduite que cela est une part non négligeable à leur bonheur, qu’ils peuvent alors mener une vie sans encombre dans leur quotidien. Je dirai que c’est le minimum de la décence qui leur ait alors offert et qui pourtant éclaire leur visage : une vie où chaque instant il faut galérer pour se déplacer chez soi n’en est pas une.

Des principes humains et sociaux se dessinent  au fil des pages :  dignité de la personne humaine, égalité, le droit au logement mais cette fois adapté à son occupant pour ses besoins réels, et bien d’autres. Une critique de la société est peinte aussi :  il n’y a qu’à regarder autour de soi, les villes, pour voir que le maximum n’est pas fait pour ces personnes.  

Tout au long de ma lecture, j’y ai vu le cri que les handicapés existent, sont présents, et doivent être considérés avec une attention plus particulière que les autres car là où il nous suffit de faire un pas pour avancer, eux doivent effectuer plusieurs manœuvres sinon rester bloquer.

Mention spéciale au personnage de Yuki qui a 14 ans a eu un handicap. Elle n’a pas cessé de sourire et d’être forte face à sa famille et ses proches, jusqu’à ce que Nagasawa lui parle car elle voyait combien Yuki souffrait de tenir cette apparence et de lui dire qu’elle avait le droit de se lâcher. La petite a éclaté en morceaux de peine. C’était sans conteste le moment qui m’a le plus touché. 

Ne garde pas tout pour toi. Ou ton cœur ne tiendra pas. 

Affinités : 

Je recommande vivement de lire cette œuvre.

Pour la pédagogie de cette histoire qui est bien plus que le récit d’une histoire d’amour entre un handicapé et une femme ayant toute sa motricité, j’invite le plus grand nombre à la découvrir et à la faire découvrir. Aussi bien aux plus jeunes qu’aux plus âgés. C’est une oeuvre humaine et sociale qui pointe du doigt de nombreux éléments importants et qui saura toucher les lecteurs sinon les éduquer.

Les points forts de ce josei : réaliste, humain, social, pédagogique, riche en émotions justes

Les points faibles de ce josei : les coups de girouette de Tsugumi

Ma note : 17/20

12 réflexions sur « Lire Perfect world : un manga social qui émeut, Tomes 2 à 8 »

      1. J’essaierai. J’ai été chez Cultura hier et j’y ai trouvé Perce Neige 1 et 2. Je les ai pris. Pas encore lus, aujourd’hui peut-être? Je voulais terminer Devils line 6 et 7 d’abord. 🙂

        Aimé par 1 personne

      2. Pas tant que ça même si c’est horrible (je m’attendais à être encore plus choquée je crois) mais c’était génial dans ce côté horrifique. Mon article est programmé pour le 19. J’essaie de prendre un peu d’avance pour finaliser un truc la tête vide. 😉

        Aimé par 1 personne

  1. Je ne sais pas pourquoi, mais je n’arrive pas à crocher avec ce manga, alors que c’est pourtant totalement mon style et que beaucoup l’apprécie. Mais les personnages ne parviennent pas à me toucher et à m’emporter dans leur histoire, je reste totalement spectatrice. C’est sympa, et je continue ma lecture, j’en suis au tome 7, mais bon pas incroyable pour moi c’est dommage ! 🙁

    Aimé par 1 personne

Laisser un commentaire

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur la façon dont les données de vos commentaires sont traitées.